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ZARDOZ
20 mars 2008

Chantal Sébire : l'enseignante et la mort, ultime intimité

Si l’on écarte d’emblée les discussions idéologiques et philosophiques oiseuses, le débat sur l’euthanasie porte essentiellement sur les dérives possibles d’une loi qui autoriserait une personne à choisir de mourir.

Deux types de dérive sont posés. Une dérive eugéniste dont la vertu du nazisme serait d’avoir exprimé le désir monstrueux du système de production socio-économique dominant à éliminer les ‘improductifs’ et d’avoir ainsi écarté durablement cette forme de déshumanisation. Une dérive individuelle, familiale soit d’assassinat prémédité et soit de compassion mal informée.

Si l’on ne veut pas considérer la dérive eugéniste comme écartée, on pourra y revenir, elle semble néanmoins peu suspecte dans les états républicains actuels.

A la seconde dérive possible, individuelle et familiale, la loi, loin de créer des opportunités, les restreindrait. L’assassinat prémédité serait rendu beaucoup plus identifiable si une procédure complexe de consultation d’experts médicaux et judiciaires devait statuer sur chaque cas. Car à l’heure actuelle, la demande de mort d’un malade est inaudible, irrecevable. La parole du mort peut donc être invoquée dans le cas d’un crime ou d’un acte compassionnel sans qu’il puisse être possible de vérifier autrement que par des témoignages, souvent reconstruits, contradictoires.. Une loi poserait la parole du malade comme un fait reconnu, entériné par une procédure qui donnerait le temps de la réflexion, du contrôle des autres voies possibles, de la validation du choix personnel en explorant les possibles pressions, de la place et du regard des proches dans la décision et face à la décision.. Ce faisant une éducation à la mort comme fait intime et une préparation au deuil pourrait apporter dans de nombreux cas un apaisement de relations familiales et sociales qui sont trop souvent négligés.

L’évolution de la mort comme de toute l’intimité depuis les débuts de la révolution individualiste est un passage de la morale à l’éthique, d’une pratique commune admise comme norme obligatoire à une pratique personnelle, fonction de perceptions, de représentations propres à l’individu qui va faire un choix et qui a besoin pour cela d’être éclairé. Mais tous ne sont pas égaux devant ces choix. Seule la loi peut égaliser, autant que faire se peut, les conditions du choix, les informations qui permettent de le faire au mieux. J’ai bien peur que le refus de nos élites de droite à envisager une loi sur l’euthanasie soit surtout la crainte du coût que nécessiteraient des comités médicaux d’expert et une décision judiciaire. Même s’il ne s’agit que de quelques centaines de cas par an, il n’y a pas de petites économies pour certains, même au prix de la dignité humaine en marche…

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