Des gladiateurs pour la populace
Quest-ce que le débat 'traditionnel' des candidats au second tour de l'élection présidentielle ?
A quel moment de sa fonction un(e) président(e) sera-t-elle(il) supposé(e) être dans une telle situation à mi-chemin entre l'examen, le pugilat et l'hypocrisie du calme ?
Un(e) président(e) sera, toujours, en situation diplomatique (peu ou pas d'agressivité) et accompagné(e) par un entourage, qui plus est à propos de sujets précis parfaitement étudiés au préalable. Les rares cas de stress viendront d'une décision grave et urgente telle qu'une évacuation de population importante en cas de catastrophe naturelle ou du fait de l'homme, d'une guerre, de l'utilisation de l'arme atomique... des cas assez rares, convenons-en. Des cas qui exigent surtout des convictions pour éviter toute hésitation, et non des nerfs que quasiment toute femme ou homme politique a largement développé durant son âpre carrière.
De fait, le débat présidentiel n'est traditionnel que pour la télévision, avec la démocratisation de laquelle il s'est imposé. Non comme un travail de fond, auquel font semblant de croire quelques un(e)s et qui nécessiterait des débats longs et techniques bien avant le premier tour. Mais comme un spectacle populacier, un combat de gladiateur pour le plaisir médiocre de la faible part civique de l'individu. Cette part qui n'a pas ou alors très mal lu des programmes politiques sur lesquels elle ne va pas être éclairée comme par magie en deux heures.
Celà traduit bien le désir d'image et de bruit bien plus que de contenu de cette mauvaise part du civisme de chacun, de son penchant médiocre pour le pugilat, les bons mots et petites phrases mesquines des homo pseudo-sapiens d'un autre temps, la part pauvre de l'humanité en chacun de nous. Celle que le politique devrait justement éviter pour montrer son désir du bien commun, tout en reconnaissant l'existence du pire, mais en sachant le mettre de côté. Car c'est bien celà le politique : une recherche du bien commun.
Mais ce débat a encore eu lieu. Mieux valait n'en regarder que des extraits et l'écouter à la radio.
Les deux ont joué en gros le
jeu qu'on leur attendait : la passivité pour le candidat de la droite,
la pugnacité pour Ségolène royal.
Les deux ont récité, souvent, leur
leçon apprise, parfois d'une triste visibilité avec un automatisme de
l'entrainement décalé par rapport aux questions posées..
Les deux
ont essayé de placer leur botte, visible comme une absence de nez au
milieu de la figure, comme un exercice scolaire. De ce point de vue le
'vous êtes sortie de vos gonds' ou 'Madame Royal a perdu ses nerfs' du
candidat de la droite était une apothéose tant 'Madame Royal' était
bien montée en puissance mais sans s'énerver (surtout si on connait la
définition de l'énervement pour un Nicolas Sarkozy capable de hurler
des menaces en public..).
Ségolène Royal était moins caricaturale
dans sa demande à l'ex-ministre de l'intérieur de réviser son
nucléaire, mais malgré tout dans une posture de placement de la botte.
Tout celà aiguillé à l'envie par un auditoire qui n'attendait souvent
rien d'autre... que ces exercices scolaires.
En revanche sur le fond, Ségolène Royal a été logique et efficace sur le point du nucléaire. Elle a voulu débattre et a été étonné de souligner ce faisant le peu d'intérêt et la faible compétence du candidat de la droite sur l'énergie... et l'écologie. Deux sujets majeurs dans le monde d'aujourd'hui et plus encore de demain.
Et les chiffres sont
importants. Elle a tout d'abord annoncé une part de 17 % de nucléaire
pour l'énergie française. Ségolène Royal n'a ensuite fourché à propos
de l'électricité que parce que le candidat de droite n'avait pas
compris la question, ni même son sens.. car il pensait seulement, lui,
à l'électricité et nous verrons plus loin pourquoi. De là son 50 %,
lancé à la volée, au hasard, dans l'espoir adolescent que la bonne
réponse ne sera pas trop éloignée...
Mais pour ce qui est de
l'électricité, l'électricité produite par le nucléaire en France
représente 86 %. Si le candidat de la droite avait essayé 100 %, on eu
rit, mais il eu été moins loin de la vérité...
Mais bien pire que
celà.. le candidat de droite a prouvé son incapacité à comprendre
l'objet de la question, l'enjeu ouvert par Ségolène Royal. L'enjeu de
l'énergie qui dépasse celui envisagé par le candidat de droite :
l'économie et la vente d'électricité aux autres pays européens...
L'une
parle d'enjeux pour l'avenir, du monde et de la France (même sur
l'emploi car les énergies renouvelables peuvent apporter des emplois
technologiques de hautes qualifications, non susceptibles de
délocalisation rapide)... L'autre parle économie à court terme avec en
filigrane la cotation espérée d'EDF et ses ventes d'électricité..
Tout
deux ont fait des erreurs et récité parfois leur leçon, mais Ségolène
Royal a montré qu'elle pouvait sortir parfois, non pas de ses gonds
(phrase toute prête sans intérêt), mais du jeux de rôle calculé. Et
elle n'a pas fait une erreur aussi inquiétante que celle exposée ici.
Considérons
tout de même que cette erreur, répétée, affirmée calmement, ne serait
pas tolérée chez un simple consultant dans un domaine avoisinant, chez
un simple professeur d'économie ou d'histoire-géographie... Je veux
bien reconnaître le droit à certaines erreur, chez l'une comme chez
l'autre mais l'énergie et la question écologique qui s'y attache.. non
! trois fois non !